On ne meurt qu’une fois, mais quand ?Dr. Guy Freys,Deuxièmes Journées Internationales d’Ethique 30/03/2007

Publié le par Emmanne

Dr. Guy Freys Deuxièmes Journées Internationales d’Ethique 30/03/2007
" Donner, recevoir un organe, Droit, dû,devoir »
Département de Réanimation chirurgicale des Hôpitaux Universitaires de Strasbourg, lors de la
Conférence :« Les Deuxièmes Journées Internationales d'Ethique
 

http://nereja.free.fr/files/GuyFreys_Presentation0307.pdf

Je suis en accord avec certaines des réflexions contenues dans ce texte de 5 pages...je ne parviens pas à mettre en lien cette présentation, je vais tenter d'en citer de larges extraits, voire de le commenter si j'en ai le courage...

Production : Université Louis Pasteur, Strasbourg
Réalisation : Colloques et Conférences
Présidence de séance :Professeur Philippe Wolf Hôpitaux Universitaires de Strasbourg
 
"Déterminer le moment précis de la mort, affirmer avec certitude l’état de mort a toujours été une préoccupation et une difficulté de l’homme avec la peur pendant des siècles de l ’inhumation prématurée. ‘
Le jugement de l’homme est tellement incertain qu’il n’arrive pas même à définir la mort disait Pline l’Ancien déjà au début de l’ère chrétienne. Pourtant, si je
vous montre ces quatre images de coucher du soleil ,quatre étapes du coucher de soleil : sur la première image, le soleil commence à se coucher,pour avoir quasiment disparu sur la dernière, où il ne reste qu’une pâle lueur, ndlr.
], je pense que personne ne mettrait en cause l'affirmation qu’il va faire bientôt nuit. Mais sur la dernière image, en bas, à droite, le soleil a disparu. Mais est-ce déjà la nuit ? Ou la lumière résiduelle permet-elle de dire que ce sontencore les derniers moments du jour ? La question de mon propos est très proche de cette
interrogation.
Quand reconnaît-on la disparition des derniers signes de la vie pour
affirmer la mort ?
Si je pose la question en ces termes, c’est que la définition de la mort,
elle, est relativement universelle et univoque : prenez n’importe quel dictionnaire, vous verrez cette définition : ‘qui a cessé de vivre’
. C’est donc bien l’absence d’éléments élémentaires vitaux qu’il faut rechercher pour affirmer la mort.La difficulté de déterminer le moment précis de la mort est d’autant plus grande que les derniers instants de la vie apparaissent de  tout temps surdimensionnés, comme si l’homme se rendait enfin compte de l’importance de la
vie et qu’elle devenait encore plus précieuse et sacrée aux derniers instants. D’ailleurs, peut-on parler d’un moment précis ? Ne s’agit-il pas le plus souvent d’un
processus où la vie s’éteint au fur et à mesure, comme le coucher du soleil? Si vous regardez les peintures qui représentent la mort, il y a une chose qui est très
frappante : c’est que la personne apparaît toujours vivante; Elle est vivante et elle
attend la mort. Cette difficulté se posait déjà quand la mort était uniquement définie comme l’arrêt circulatoire, avec déjà le problème sous-jacent de lacertitude de l’irréversibilité de cet état et de l’angoisse qui l’a toujours accompagnée : la
peur d’être enterré vivant.
Taphophobie : aussi, pour s’assurer que ne subsistait aucuneétincelle de vie, on pratiquait parfois des tests qui seraient aujourd’hui jugés intolérables. Je
vous en cite juste un : le test de Balfour
, qui consistait à planter un petit drapeau dans le cœuret de s’assurer qu’il ne bougeait plus. (...) Un système consistait à relier à la cage thoracique du cadavre un système actionnant une clochette. Si par malheur la clochette sonnait, cela
signifiait que le cadavre respirait encore. Il n’était donc pas encore mort !
Si on voulait être sûr et certain de la mort, mieux valait encore attendre la putréfaction, ce qui était d’ailleurs pratiqué dans beaucoup de civilisations
. Je vous rappelle aussi que l’expertise médicale de la mort n’est apparue que pratiquement à la fin du XIXème siècle et que le certificat médical de
décès n’est obligatoire que depuis 1937 pour permettre à l’officier d’Etat civil de délivrer le permis d’inhumer.Ce n’est qu’en 1948 que l’arrêt circulatoire est annoncé comme signe légalement reconnu de la mort par décret
. Vous le voyez, c’était déjà difficile. Mais cette difficulté inhérente de définir et de préciser le moment et l’heure de la mort va se trouver accentuée par ou du fait des progrès de la réanimation à partir du milieu du XXème siècle, où la réanimation permet de suppléer des fonctions cardiaques et respiratoires qui
représentaient jusqu’alors les critères scientifiques indiscutables de la mort
. Ces avancées vont nécessiter de revoir la définition épistémologique de la mort.
J’aimerais souligner d’emblée que l’adoption d’une définition cérébrale de la mort
comme fin d’un fonctionnement intégré et cohérent de l’organisme humain n’est pas en opposition avec la définition circulatoire, mais juste une mise à jour prenant en compte les avancées des connaissances médicales
.Mais l’acceptation de cette évolution scientifique ne peut en aucun cas se dispenser de négliger les aspects religieux, philosophiques, culturels et sociaux
. Un petit rappel historique s’impose. Ce nouveau concept de mort cérébrale se
dessine à partir de 1959, à partir des descriptions de
coma dépassé. En1965, le Professeur Goulon avait organisé un gros colloque à Marseille qu’il avait intitulé :Les états frontière entre la vie et la mort
’ et reconnaissait à l’époque l’absence de critères simples, indubitables, objectifs qui permettent de dire clairement s’il y a mort.
Le terme de mort cérébrale apparaît pour la première fois dans un article qui relate une greffe à partir d’un organe prélevé sur un patient ... ‘à cœur battant’
!C’est donc le développement de la transplantation qui va nécessiter de toute urgence, de la part de la communauté médicale, une définition claire de cette mort cérébrale pour permettre le prélèvement d’organes et recueillir l’acceptation sociétale d’une telle procédure. En 1968 on valide le concept de mort cérébrale (5 août 1968,déclaration de Harvard aux USA et 25 avril1968 :circulaire Jeanneney )mais on se garde bien d’en préciser les critères,les Américains disant qu’il faut les établir en fonction des connaissances et en France, la fameuse circulaire Jeanneneydit que l’élaboration des critères va être imminente et proposée par l’Académie de Médecine. Il faudra attendre 28 ans pour les voir apparaître. La France a donc eu quelques mois d’avance sur les Américains pour décréter que la  mort cérébrale était un état de mort.Monsieur Cabrol, deux jours après la promulgation de cette circulaire, va faire la premièregreffe à partir d’un donneur considéré en mort cérébrale Vous voyez donc que pour une fois,t
nous n’étions pas en retard. L’arrivée de ce concept a apporté avec lui une multitude d’interrogations éthiques et a engendré nombre de controverses et de confusions, beaucoup n’y voyant qu’un prétexte pour légaliser le prélèvement d’organes su personne décédée àcœur battant’
. Ce concept est aussi initialement controversé même chez les professionnels de
la santé puisque si vous regardez des études des années 80, vous vous rendre compte que 40% des professionnels de santé sont très réticentsà  admettre cette mort cérébrale
. Cette méconnaissance reste encore aujourd’hui à mon sens le frein le plus important pour l’ acceptation du don et la  mort encéphalique] reste le parent pauvre de l’information au grand public et principalement le principal responsable du refus des familles confrontées au don d’organes.Ce scepticisme est dû à l’aspect non conventionnel de la mort, puisque le cœur bat et la peau est chaude. Penser que ce corps est mort n’est pas aisé."
 


La mort était un mystère, elle est désormais un problème.

Gabriel Marcel philosophe français,

Pour ajouter à la difficulté de compréhension, deux concepts vont voir le jour : celui de la mort encéphalique :’whole brain death’ adopté aux USA, en France et aujourd’hui par une majorité de pays, qui exige la destruction du cerveau et du tronc cérébral ; et la mort du tronc cérébral : ‘brainstem death’ concept adopté au Royaume-Uni et en Inde, qui reconnaît à cette seule destruction (celle du tronc cérébral) le statut de mort. Ce qui est sûr, c’est que ces deux états sont des états de non-retour à la vie personne n’en est jamais réchappé -, et que
la respiration est abolie Il faut donc une suppléance de la fonction respiratoire. Ces états conduisent toujours à court terme à l’arrêt de toutes les fonctions de l’organisme, quels que soient les moyens de réanimation mis en œuvre. Les différents pays, qu’ils aient adopté la mort encéphalique ou la mort du tronc cérébral, ont rapidement ressenti la nécessité de légiférer sur la validité médico-légale de ces morts, mais aussi sur les critères de définition, la finalité de ces critères étant de constater l’état irréversible du constat de la mort.Ce qui frappe, ce qui dérange, ce qui va alimenter la confusion, c’est que les critères retenus varient d’un pays à l’autre Or là on ne peut pas invoquer des différences culturelles.
On demande des faits scientifiques, aussi ces variétés de définition ne facilitent-elles ni la compréhension et, surtout, ni l’adhésion du grand public. Ainsi, dans certaines législations, la seule observation clinique suffira à établir le diagnostic de la mort, dans d’autres pays, on exigera un test ou un examen de confirmation pour valider le caractère irréversible de cette mort cérébrale. Je vous ai représenté là l’article du Monde qui est paru juste avant le fameux décret du 22/12/1996 qui régit la définition de la mort encéphalique en France. Cet article souligne la difficulté de la rédaction du décret définissant la mort encéphalique,et témoigne des avis divergents, qui au sein même du corps médical sesont exprimés sur un thème aussisensible et d’une grande portée symbolique
. L’article souligne aussi queces dispositions s’inscrivent dans un paysage fort contrasté, qui voit l’opinion publique avoir à la fois confiance dans l’efficacité des équipes médicales et redouter ‘la rapacité de ces mêmes équipes’.
La conclusion de cet article met l’accent sur le travail pédagogique à accomplir pour faire en sorte que soient mieux perçus les objectifs, les difficultés et les nécessités pratiques du corps médical On voit bien que dans tous ces textes, dans tous ces besoins de législation, les peurs ont changé, les peurs se sont déplacées :
la peur de l’inhumation prématurée a fait place à la peur des morts qui n’en seraient peut-être pas. Il y avait donc urgence à vraiment donner des définitions claires et précises de cette mort encéphalique et de celle du tronc cérébral. En tout cas, comme le souligne un philosophe italien, Alberto Acero,ces définitions pragmatiques introduisent un écart considérable entre la mort humaine et celle de toute autre être vivant.
 
Momentanément je stoppe ma remise en page lisible de cet article.. je conseille vivement d'aller le lire sur le site.

 

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article